Yves Pagès – Portrait d’un fils de zoologue en enfant-cobaye, pour le résumé à minima. Autoportrait plutôt. Mon père ayant été psychosociologue au CNRS, la part du vécu, même transposée côté animal (études des singes & souris), est indéniable. À partir de documents retrouvés dans l’appartement familial, mon alter ego narrateur suspecte que, durant sa prime jeunesse, il a fait l’objet d’un examen scientifique permanent par ses géniteurs. Un test de personnalité grandeur nature. Mais au fil du récit, l’hypothèse s’inverse, et le père, pris à son propre piège, finit rat de laboratoire. Du coup, ça fonctionne comme un thriller œdipien à base de manipulation mentale. Sauf que, faute de Big Father, on s’aperçoit qu’il n’y a pas de secret manipulateur, sitôt brisée la glace sans tain. Autrement dit : parano, go home ! Tout ça a l’air très pensé, mais le livre s’est plutôt aggloméré de bric et de broc, jusqu’à son ultime résolution, peu après la mort de ma mère. Quand même, j’ai aussi voulu y aborder une question lancinante : ma fascination-répulsion pour les « sciences humaines », au sens large. Ces théories-là m’ont nourri et dégoûté très tôt. J’en lis encore beaucoup et m’en méfie pareil. Toujours cet hiatus entre le recul de la pensée critique et son rôle insidieux dans le formatage des rapports sociaux. Outil d’émancipation ou camisole psychique… Y compris dans le choix du titre, ça se bégaye ensemble.
nota bene, RSR, 27 août 2011, 10mn